• Français, soyez révolutionnaires, que diable!!

    Le ministère de l’Enseignement supérieur reçoit chaque jour sa ration de poil à gratter. Parmi les sujets irritants, il faut mentionner les cris d’orfraie qu’émet l’UNEF, sitôt qu’il est question d’augmenter ne serait-ce que de 2 euros les droits d’inscription. « Mesure scélérate », « atteinte insupportable au pouvoir d’achat », etc. Généralement, l’UNEF ne fait pas dans la dentelle. Son propos est ostensiblement exagéré. 2 euros, c’est beaucoup pour un jeune Tanzanien qui va nu-pieds à l’école ; ça ne l’est pas pour les centaines de milliers d’étudiants qui trouvent naturels d’engloutir chaque mois 50 euros en abonnement téléphonique et autres fariboles.

    Pourtant, à bien y réfléchir, sur le fond, l’UNEF a raison de rouspéter. Pourquoi en effet les étudiants inscrits à l’université devraient-ils subir  pareille « augmentation » ? Poussons le raisonnement : pourquoi même devraient-ils payer pour faire des études supérieures menées dans de mauvaises conditions, quand les étudiants des écoles publiques généralistes (X et Ecoles Normales), au même moment, poursuivent des études dans le plus grand confort et, de surcroît, reçoivent un salaire ? Pourquoi, au simple motif qu’ils étaient au lycée forts en maths ou en thèmes, qu’ils étaient surtout moulés par papa et maman pour l’enseignement supérieur français (docilité, conformisme et sage bachotage), ces premiers de classe sont aujourd’hui rémunérés dans des établissements qui ne sont qu’une énième variante de club Med. Sur le campus de l’X, où les étudiants ne poursuivent aucune recherche (elle est faite essentiellement par les non polytechniciens venus du CNRS ou des facultés de sciences, et qui turbinent dans les laboratoires de Palaiseau), on trouve un centre équestre, un lac, des terrains de foot et de rugby à la pelle, etc. Sont-ce là les lieux où se préparent les guerres technologiques de demain ou bien les bacs à sable pour une élite qui n’est que scolaire? Le soutier de l’UNEF, à qui l’on demande un euro supplémentaire de droit d’inscription peut en effet se demander pourquoi ces fils et filles de profs (50% des effectifs français à l’X) sont payés pour des études qui les conduiront à majoritairement filer vers la banque, l’assurance, la grande industrie ? A quoi sert donc cette école ? A HEC, les cours sont payants, à ce que je sache. Les deux écoles forment pourtant les mêmes cadres, comme le montre le classement Times Higher Education des PDG des 500 plus grandes entreprises.

    Dans un pays obsessionnellement travaillé par l’égalité, pourquoi les étudiants en université devraient-ils payer, même des cacahouètes quand les autres sont rémunérés, logés et blanchis, tout ça en préparation de la course du rat qui suivra, à la City londonienne  ou dans la salle des marchés de la Société générale ? Question d’autant plus urticante qu’a été dévoilé que, bons scribes dénués de la moindre capacité d’innovation (ici, nous ne sommes ni à Stanford ni à Harvard, n’est-ce-pas), ces premiers de classe, se bousculaient pour courir vers le privé. Pis, qu’avec la complicité active de leurs écoles, aucun ne remboursait le coût de sa scolarité qu’avait financé la collectivité.

    Aux observateurs les plus fins n’a pas non plus échappé que, pourtant gavés aux frais de la collectivité, nos premiers de classe devenus cadres supérieurs ou parachutés dirigeants d’entreprise par la grâce du diplôme, sont très radins : en témoigne la modestie des campagnes de fonds auprès des alunis, comparés à ce que versent les étudiants dans les établissements anglo-saxons qui, eux, ne salarient pas leurs étudiants mais les assomment pourtant de lourds droits d’inscription.

    Ces coûts de formation, jamais récupérés, lèvent un autre lièvre : de quelle crédibilité peuvent se prévaloir les directions civil et militaire de ces établissements publics qui, pendant des décennies, ont fermé les yeux sur l’obligation contractuelle faite à leurs étudiants bifurquant vers le privé une fois leur diplôme en poche de rembourser leurs frais d’études, de surcroît sous-évalués ? Ces présidents d’école apparaissent certes comme d’exécrables gestionnaires, organisateurs d’un gâchis qu’ils ont laissé prospérer. Au vrai, ils ne sont pas uniquement incompétents. Sans doute sont-ils aussi de prudents calculateurs : à exiger de leurs étudiants qu’ils remboursent les fameuses pantoufles à l’X, l’ENA ou l’ENS, peut-être craignent-ils que l’obligation remonte jusqu’à eux, à leurs rejetons, tous passés par les mêmes matrices.

    Le vrai sujet d’étonnement, c’est que le scandale n’ait pas été éventé plus tôt. Finalement, les nantis des  grandes écoles à la française  (« que le monde entier nous envie ») et les miséreux de l’UNEF ont de bonnes raisons de faire front commun. L’augmentation des droits d’inscription ne passera pas !. http://www.francois-garcon.com/

     


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